Les fonds Evergreen, un format adapté aux particuliers

01/12/2024 - source : Investissement Conseils

Ces fonds ouverts suscitent l’intérêt croissant des sociétés de gestion dans le cadre de l’application de la loi industrie verte le 24 octobre. Leur potentiel est indéniable pour rendre le Private Equity accessible à un large public. Les investisseurs doivent néanmoins garder à l’esprit la nature illiquide de ces actifs et rester lucides sur les rendements attendus. 

Le 24 octobre marque un tournant significatif pour les finances des Français. Ce jour-là entrera en vigueur la loi industrie verte, qui introduit des modifications majeures dans l’épargne nationale. Parmi les mesures phares, l’obligation d’inclure un minimum d’actifs non cotés dans la gestion pilotée des assurances-vie et des plans d’épargne retraite (PER) promet de transformer le paysage de l’investissement en France. Après la loi Macron de 2015, la loi Pacte de 2019 et le récent règlement européen Eltif 2, ce rendez-vous constitue un jalon majeur d’une tendance de fond : la démocratisation du capital-investissement, longtemps réservé aux institutionnels, et, dans une moindre mesure, aux family offices ou aux clients fortunés des gestionnaires de patrimoine. Il reste que les véhicules traditionnels du Private Equity ne sont guère adaptés au grand public, en raison de montants de souscription trop élevés, de calendriers de levées de fonds exigeants et de longues périodes de blocage des capitaux. Encore très minoritaires dans le paysage financier, les fonds dits Evergreen devraient s’imposer comme la clé d’une distribution réussie vers les particuliersAlternative aux fonds fermésDe quoi s’agit-il ? « Traditionnellement, l’industrie du Private Equity fonctionnait avec des fonds fermés, caractérisés par une durée de vie déterminée (entre huit et douze ans) et des appels de fonds (sur une période d’un à cinq ans). Une alternative émerge depuis quelques années avec des fonds ouverts dits Evergreen, qui font de plus en plus d’émules, tant du côté des GP (sociétés de gestion) que des LP (investisseurs) », observe Maxime Defasy, directeur des investissements du cabinet de conseil Althos Patrimoine, dans un article intitulé « Les fonds Evergreen : la solution pour investir en Private Equity ? » Ces fonds Evergreen, mot anglais qui signifie « toujours vert » par analogie avec les arbres à feuilles persistantes, se distinguent par leur absence de durée de vie fixe et de date de clôture. Convaincue de ses vertus, les industries de la gestion et de l’assurance se mettent en ordre de bataille pour se préparer à cette nouvelle donne. Plusieurs asset managers avaient déjà construit ce type de fonds, avant même les dernières évolutions réglementaires. De grandes maisons américaines, comme Blackstone, sont familières de ces structures, et proposent notamment des produits de dette privée, désormais éligibles à l’assurance-vie française. « Les fonds Evergreen sont un vecteur important pour élargir la typologie des investisseurs dans le non-coté, C’est déjà le cas aux Etats-Unis et au Royaume-Uni », constate Erwan Paugam, responsable Private Wealth Solutions et Managing Director chez Ardian. En France, NextStage AM a créé son premier fonds Evergreen dès 2015 (cf. interview). Eurazeo a lancé Eurazeo Private Value Europe 3 (EPVE3) en 2018, à l’issue d’une longue réflexion. « Notre marque de fabrique est d’offrir nos stratégies d’investissement à tous types de clients. Le fonds Evergreen est la meilleure solution pour servir notre clientèle privée », estime Luc Maruenda, Head of Wealth Solutions chez Eurazeo. « EPVE3 dispose déjà d’un encours de 2,2 milliards d’euros. Nous espérons atteindre 3 milliards d’ici douze à dix-huit mois », poursuit-il.Décliner les stratégies pour l’assurance-vieLes fonds Evergreen 01Depuis début 2023, Ardian gère également Ardian Access Solution, un FCPR Evergreen de Private Equity dont l’encours devrait dépasser 200 millions d’euros d’ici la fin de l’année. En 2022, la société de gestion présidée par Dominique Senequier avait d’ailleurs déjà mis sur pied Ardian Clean Energy Evergreen Fund, dédié à la transition énergétique et réservé aux investisseurs professionnels. « Preuve que les institutionnels s’intéressent aussi à l’Evergreen pour la simplification de l’investissement et la diversification du sous-jacent », argumente Erwan Paugam. « Nous travaillons sur le sujet depuis deux ans pour décliner certaines de nos stratégies de fonds de fonds et les adapter à l’assurance-vie. Nous avons obtenu l’agrément en janvier pour deux FCPR Evergreen », témoigne Julien Godard, Senior Partner chez Elevation CP, société de gestion d’actifs non cotés du groupe Inter Invest. D’autres acteurs s’emparent du calendrier réglementaire pour se positionner. Ainsi, Sienna IM vient de lancer Sienna Private Assets Allocation. Le gérant d’actifs du groupe financier GBL s’est associé à Cedrus & Partners, spécialisée dans le conseil en allocation et la distribution de fonds. Objectif : lever 500 millions d’euros à moyen terme, dont 40 millions déjà apportés par GBL. De même, le Britannique Schroders est sur la ligne de départ avec un fonds Eltif 2 Evergreen investi en dette d’infrastructures. Après l’obtention de l’agrément AMF (Autorité des marchés financiers), ce nouveau produit doit être commercialisé au quatrième trimestre, avec des objectifs ambitieux vers la clientèle retail en Europe, pour ce fonds de droit français. « Nous souhaitons lever 300 millions d’euros au cours des douze ou dix-huit premiers mois, puis dépasser le milliard à horizon trois ou quatre ans. L’estimation est complexe, car les résultats dépendent du degré d’application de la loi industrie verte par les assureurs », indique Yves Desjardins, directeur général de Schroders France. Vont-ils l’appliquer uniquement aux nouveaux flux d’épargne, comme stipulé par la loi, ou également aux contrats existants ? D’après le responsable, nombre d’entre eux choisiront de l’appliquer aux stocks afin d’éviter un traitement différencié de leurs mandats de gestion.Il faudra du tempsLes fonds Evergreen 02D’autres encore se placent sur un horizon un peu plus lointain. Mirova, société de gestion dédiée à l’investissement responsable, prépare un véhicule pour début 2025. « Nous espérons atteindre un objectif ambitieux à moyen terme, mais nous savons qu’il faudra du temps pour que ce fonds atteigne sa vitesse de croisière », annonce Marc Romano, directeur du Private Equity à impact chez Mirova. Selon lui, les véritables réussites ne se feront pas sentir avant deux ou trois ans. De même, Astorg approfondit sa réflexion en vue de construire un produit dédié aux investisseurs privés d’ici 2026. « Nous réalisons des simulations en examinant les scénarios pour déterminer la meilleure allocation et la meilleure structuration », annonce Joséphine Loréal, Managing Director, en charge des intermédiaires financiers chez Astorg. Les avantages de l’Evergreen sont nombreux et indéniables, en termes de montants minimums de souscription, parfois réduits à 1 000 euros, et de gestion des appels de capitaux. « Les fonds Evergreen génèrent un flux unique lors de la souscription comme pour un fonds coté. Les capitaux travaillent plus vite et de manière diversifiée dès le premier ticket. Dans un fonds fermé, l’exposition se construit sur plusieurs années au fil des investissements », compare Erwan Paugam (cf. graphique comparant un fonds Evergreen à un fonds traditionnel ci-dessous). « Le non-coté implique beaucoup de complexité avec des appels de fonds progressifs », note Sébastien Roca, directeur général de Cedrus. « Si ces flux décalés dans le temps sont possibles pour les montants significatifs des institutionnels et des investisseurs sophistiqués très outillés, ils deviennent ingérables pour des milliers d’épargnants et des tickets de quelques milliers d’euros ». « Le gérant peut se concentrer sur la création de valeur et la sélection des investissements, non sur la gestion des fenêtres de souscription et l’administration des appels qui finiraient par ressembler à une usine à gaz à l’échelle du retail », ajoute Xavier Collot, Managing Director, Listed & Hybrid Assets chez Sienna IM.Accroître la diversificationLa diversification constitue un autre atout de ces véhicules flexibles, à même de réinvestir les capitaux en continu, à la différence des fonds fermés qui doivent liquider leurs actifs à la fin de leur cycle d’investissement. « Les fonds Evergreen ont généralement un nombre de sociétés plus important en portefeuille que les fonds fermés. Sur des multi-stratégies alliant investissement primaire, co-investissement et secondaire, on peut atteindre plusieurs centaines d’entreprises sous-jacentes. Cette approche améliore également la diversification des millésimes », comme l’explique Maxime Defasy. Luc Maruenda confirme : « Notre fonds est structuré avec une allocation de 60 % en dette privée et 40 % en stratégies secondaires en capital. La dette privée est déployée par le groupe Eurazeo, tandis que la stratégie secondaire consiste à racheter des portefeuilles de participations, auprès de fonds ou d’institutionnels. Cela permet une diversification immédiate ». Le portefeuille est exposé à cent-quatre-vingt-quatorze sociétés, dont cinquante-cinq en dette privée et cent-trente-neuf en Private Equity pour un montant total engagé de 1,362 milliard d’euros.Les fonds Evergreen 03Produits de campagne« Ardian Access Solution est très diversifié en termes géographiques et de gérants sous-jacents sur des expertises triées sur le volet », ajoute Erwan Paugam. Autre point positif : ce type de fonds convient aux contraintes de l’assurance-vie. « Notre FCPR est toujours ouvert avec une reconduction tacite de la période de souscription tous les deux ans. Il est référencé dans une centaine de contrats d’assurance-vie auprès d’une quinzaine d’assureurs, chacun offrant des niveaux de liquidité différents », fait remarquer Luc Maruenda. Certes, les FCPR fermés sont également éligibles à l’assurance-vie et conformes à la loi industrie verte. « Ces structures vont continuer à exister. Les produits de campagne stimulent le démarchage et les réseaux de distribution avec des durées de placement limitées dans le temps », commente Yves Desjardins. La limite réside néanmoins dans l’inertie du processus de distribution, qui prend entre douze et dix-huit mois. « Les fonds doivent être référencés auprès de compagnies d’assurances, de banques et de CGP, qui sont déjà très sollicités. Une fois ce processus achevé, il ne reste parfois que quelques mois de commercialisation avant que les fonds ne soient fermés », souligne Marc Romano. Enfin, la liquidité constitue un atout essentiel des fonds Evergreen, en offrant aux particuliers la faculté de souscrire et de racheter leurs parts, dans des conditions qui s’apparentent aux actifs cotés. Compte tenu de la nature des investissements, on parle toutefois de semi-liquidité. « Il est possible de sortir de Private Value Europe 3 sans pénalité à des périodes trimestrielles prédéfinies. Les fenêtres s’ouvrent à la fin de chaque trimestre civil : 31 mars, 30 juin, 30 septembre et 31 décembre. Il faut se déclarer soixante jours à l’avance », détaille Luc Maruenda.Liquidité autoportéeLes fonds Evergreen 04Cette liquidité est exigée par l’AMF et par les assureurs, qui veulent limiter l’exposition de leur bilan en cas de flux importants de rachats. Le degré de liquidité requis par le régulateur dépend de la nature des actifs mais aussi des canaux de distributions. « Les textes prévoient seulement 5 % de liquidité si l’assureur s’engage à endosser les rachats, mais l’AMF demande un seuil minimum de 30 % dans le cas d’une liquidité autoportée », affirme Xavier Collot. Les gérants complètent leurs portefeuilles avec des actifs liquides pour faire face eux-mêmes aux demandes de sortie. Un portefeuille bien construit et bien diversifié peut offrir une liquidité naturelle, régulière et constante. « Notre fonds de fonds combine des stratégies de Private Equity et d’infrastructures pour un total de 70 % d’actifs non cotés et des actifs liquides (supports monétaires et obligataires) pour les 30 % restants », indique Xavier Collot. Une valeur liquidative est calculée deux fois par mois. « Sans cette liquidité régulière, il est très complexe d’obtenir un référencement auprès des compagnies d’assurance », insiste Sébastien Roca. « Ce qui s’est passé dans le monde de l’immobilier et des SCPI a renforcé la vigilance des assureurs et des régulateurs. Ces derniers accordent une attention particulière aux tests de liquidité et à la valorisation des véhicules sous-jacents. C’est la raison pour laquelle les agréments sont longs et difficiles à obtenir », confirme Xavier Collot. L’exercice est délicat, avertit Julien Godard : « Le capital-investissement a des particularités dans son rythme d’investissement et son illiquidité, qui rendent complexe son intégration dans les contrats d’assurance. Cela implique des défis techniques et réglementaires ». Cette liquidité s’avère néanmoins relative pour les nouveaux fonds : « Ce n’est pas une structuration juridique qui va changer la nature fondamentale des actifs sous-jacents. Nous avons prévu une période de lock-up de cinq ans pour les investisseurs. Après cela, les rachats seront possibles, mais limités à environ 5 à 6 % par trimestre et par investisseur, afin d’étaler les sorties sur plusieurs années. Cette approche nous permet de gérer la liquidité de manière prudente et alignée avec la nature des actifs sous-jacents, tout en évitant de créer de fausses promesses », justifie Marc Romano.Travail de pédagogieCes subtilités impliquent d’ailleurs un important travail de pédagogie : « Nous collaborons avec nos partenaires assureurs et distributeurs sur la communication et l’éducation. Plutôt que d’employer le terme Evergreen, un peu obscur, je préfère parler de fonds ouverts avec des rachats limités à 5 % par trimestre sur la taille du véhicule », expose Yves Desjardins. « Pour ce fonds, nous avons privilégié la dette d’infrastructure, qui comprend moins d’inconnues dans la gestion de la liquidité, en raison du détachement des coupons et de la maturité des titres qui offrent une bonne visibilité sur les cash-flows futurs », poursuit-il. Il reste que cette liquidité a un prix. « Quand on veut réduire le risque de liquidité, on réduit aussi le rendement. Il faut être clair sur ce point à propos des fonds Evergreen, compte tenu des promesses de rémunération à deux chiffres qui circulent souvent dans le public », a mis en garde Alexis de Rozières, directeur associé au sein de la société d’épargne salariale Eres Group, lors de la dernière Université d’été de l’asset management. « Calculé par un cabinet d’audit, notre objectif de performance annualisé est de 8 %, sur une durée de huit ans », indique Xavier Collot. Les family offices obtiennent plutôt des TRI (taux de rendement interne) de 15 à 20 % pour des investissements en direct. « Dans les conditions de marché actuelles, notre produit a vocation à délivrer un rendement brut de 8 à 8,5 %, soit environ 6 à 6,5 % nets. Cet objectif de performance répond à l’objectif de liquidité que nous nous sommes fixés, avec un portefeuille composé à 80 % d’actifs non cotés et à 20 % d’actifs facilement négociables, comme des instruments monétaires », précise Yves Desjardins. « Depuis sa création, notre performance annualisée nette est de 6,7 % au 30 juin 2024. Ces chiffres sont nets de frais, mais bruts des frais d’assurance-vie, qui incluent les frais d’entrée de l’assureur », rapporte pour sa part Yves Maruenda. « Notre fonds rassemblera l’ensemble de nos stratégies de Private Equity, avec un objectif de rendement d’environ 10 % et un multiple de valorisation de 1,8, tout en maintenant une rigueur sur la gestion de la liquidité qui est un point crucial », précise Marc Romano.Où placer le curseurToute la difficulté consiste à placer le curseur au bon endroit pour préserver la liquidité, sans trop grever les rendements. Mais les épargnants y trouveront-ils leur compte si la performance ne dépasse guère celle d’un fonds d’actions cotées ? Pour Bertrand Rabot, directeur de l’offre chez Laplace (groupe Crystal) : « Il ne faut pas promettre aux clients privés les mêmes rendements qu’aux institutionnels. Il est essentiel de les sensibiliser aux risques et aux contraintes de ces produits. Depuis quatre ans, nous expliquons à nos clients que l’illiquidité et le temps long sont la contrepartie des performances élevées. Les fonds Evergreen, avec leur promesse de liquidité, dénaturent un peu cette classe d’actifs. Leurs performances seront dégradées par rapport à un fonds institutionnel classique. La gestion de la liquidité, les frais supplémentaires et la nécessité de déployer le capital rapidement réduisent la capacité de ces fonds à performer aussi bien ». Les fonds Evergreen 05Sorties importantes de capitaux  ?Celui qui a structuré l’activité de Private Equity chez Crystal redoute aussi un effet ciseaux : « En cherchant à offrir de la liquidité, les fonds Evergreen risquent d’introduire une volatilité à laquelle les fonds institutionnels échappent. En période difficile, cela pourrait entraîner des sorties importantes de capitaux et compromettre la performance à long terme. C’est ce que nous avons constaté dans l’immobilier ces dernières années. Je suis curieux de voir comment ces fonds se comporteront en période de stress ». Les promoteurs des fonds Evergreen font valoir qu’ils réinvestissent plus aisément les capitaux qu’un fonds fermé. « L’Evergreen a l’énorme avantage de replacer immédiatement les sommes générées par les précédentes allocations. Cela génère un effet boule de neige positif », estime Erwan Paugam. «Pour un multiple de valorisation de 2x, un fonds fermé doit réaliser un TRI de 18 %. A multiple égal, il suffit d’un TRI de 9 % pour un Evergreen », calcule Sébastien Roca (cf. graphique ci-dessous sur la comparaison de la lecture de performance entre un fonds Evergreen et un fonds traditionnel). Les nouveaux entrants devront toutefois surmonter la fameuse courbe en J, qui se traduit par une sous-performance initiale des fonds, le temps que les investissements portent leurs fruits et que les coûts initiaux d’acquisition soient absorbés. A ce titre, les anciens véhicules sont à privilégier. « Si le fonds est nouvellement créé, nous conseillons d’attendre au minimum le premier anniversaire pour s’assurer que le portefeuille soit déjà bien constitué et que la courbe en J soit dépassée », recommande Maxime Defasy. Des mesures sont néanmoins prises pour atténuer ces effets, notamment en augmentant la part des investissements secondaires qui bénéficient d’une décote. De quoi modérer la déception des épargnants souhaitant se familiariser avec une classe d’actifs encore mal maîtrisée.

«  Les fonds Evergreen peuvent réinvestir en continu  »Les fonds Evergreen 08Investissement Conseils :  Quelle est l’origine des fonds Evergreen ? Pourquoi dit-on Evergreen ?Grégoire Sentilhes : Le pionnier des fonds Evergreen est Berkshire Hathaway, fondé il y a soixante ans par Warren Buffet aux Etats-Unis. Ce fonds offre un taux de rendement interne (TRI) moyen de 21 % par an depuis sa création. Les fonds Evergreen ont émergé pour répondre aux besoins des investisseurs, des épargnants et des entreprises en quête de financements pérennes. Cette typologie de fonds crée de la valeur sur le long terme et ne contraint pas les investisseurs à céder l’ensemble de leurs participations après cinq ou sept ans. Contrairement aux fonds traditionnels, dont la durée de vie est déterminée (souvent comprise entre dix et quinze ans), les fonds Evergreen n’ont pas de date de clôture fixe. On les appelle « Evergreen », ou « toujours vert » en anglais, car ils peuvent réinvestir en continu les profits et les remboursements de capital dans de nouvelles opportunités. Un investissement à 10 % de TRI générera un multiple de 2,59 sur dix ans et de 17 sur trente ans. Cette croissance exponentielle et cette « magie » des intérêts composés sont illustrées par la table de capitalisation (cf. ci-contre), rendue célèbre par Albert Einstein, qui la qualifiait de « huitième merveille du monde » et de « force la plus puissante de l’univers ». « Celui qui le comprend, en bénéficie ; celui qui ne le comprend pas, en paye le prix », disait-il. Pourquoi le Private Equity s’est-il construit sur un modèle de fonds fermés, notamment en France ?Ceci n’est pas spécifique à la France. C’est aussi vrai aux Etats-Unis, en Asie et dans l’ensemble de l’Europe. Les fonds fonctionnent avec une période d’investissement, de généralement cinq ans, et une période de désinvestissement définie à l’avance, de cinq ans également, soit environ dix ans au total. Cela simplifie la gestion des investissements et des retours pour les investisseurs qui souhaitent travailler avec des dates précises. La croissance de l’épargne-retraite à travers le monde a accéléré le développement des véhicules Evergreen qui permettent un alignement plus efficace entre l’actif et le passif, optimisant ainsi la performance pour l’épargnant.Les fonds Evergreen 06Dans quel cadre réglementaire et juridique cette notion d’Evergreen s’inscrit-elle ?Ils s’inscrivent dans un cadre juridique et réglementaire qui varie selon les pays. En France, il n’existe pas de format imposé pour ces types de fonds qui sont, dans tous les cas, régulés par l’AMF. Ils peuvent être structurés sous la forme d’OPCVM ou de FIA (fonds d’investissement alternatifs). Dans le monde du capital-investissement, ils sont principalement structurés sous formes de FCPR Evergreen ou de société de capital-risque (SCR) gérés par une société de gestion de portefeuille, elle-même agréée par l’AMF.En quoi les fonds Evergreen sont-ils adaptés à la conjoncture et à la situation des entreprises ?Ils offrent une flexibilité accrue, et permettent de ne pas subir les cycles économiques et les événements conjoncturels lors de la cession des participations. Dans un environnement incertain, les entreprises bénéficient de capitaux à long terme. Les fonds se libèrent de la pression de vendre rapidement leurs participations et optimisent les sorties avec les entrepreneurs. Les fonds Evergreen sont adaptés à l’ensemble de l’économie. Par définition, les secteurs nécessitant des investissements de long terme ou des innovations continues sont plus adaptés à ce type de véhicule, mais cela ne constitue pas une exclusivité.Les fonds Evergreen 07