Ces deux produits permettent de se constituer un capital financier sur le moyen-long terme. Lequel privilégier ? Comment articuler le PER (plan d’épargne-retraite), placement jeune mais en vogue, avec l’indéboulonnable assurance-vie ? Place au comparatif, utile pour ensuite élaborer les bonnes stratégies patrimoniales.
« L’assurance-vie et le PER individuel ne sont pas en compétition, mais complémentaires. » Voici d’une phrase résumé la position des professionnels quant à la comparaison des deux placements. Vu de haut, cette position ne surprend pas. D’abord, si elles sont plutôt destinées à capter l’épargne de moyen-long terme au moyen d’une offre financière similaire, ces deux enveloppes reposent sur un cadre juridico-fiscal différent. A charge pour les épargnants et leurs conseillers d’en tirer profit. Ensuite, PER et assurance-vie sont aux mains des mêmes gestionnaires, à savoir les compagnies d’assurances-vie (sauf rares exceptions que sont les PER dits bancaires), qui en balisent, pilotent et garantissent la bonne exécution.Comme pour l’ex-Perp (plan d’épargne-retraite populaire) et les contrats Madelin, les assureurs ont gardé la mainmise sur le marché de l’épargne-retraite pour les particuliers depuis le lancement du PER en octobre 2019. Preuve en est, France assureurs, la puissante fédération des compagnies, relate chaque mois les résultats de l’assurance-vie et ceux du PER. Ces deux placements font bien maison commune. Logique, puisqu’hier comme aujourd’hui, la préparation de la retraite fut – et reste – l’un des principaux arguments de vente de l’assurance-vie. Entrons dans le détail de l’analyse.
Des similitudes… et des différencesAu préalable, attardons-nous sur le contenu des produits, leurs ressemblances et leurs différences.Qui le sait ? Juridiquement, tout PER individuel est un contrat d’assurance-vie, ce qui est écrit noir sur blanc dans sa notice contractuelle. Mais ce qui est rarement stipulé dans la communication des établissements financiers. Un contre exemple, sur le site de la banque LCL (groupe Crédit agricole) : « LCL Retraite PER est un contrat d’assurance-vie multisupport qui permet d’épargner pour vous constituer un complément de retraite dans un cadre fiscal spécifique », peut-on y lire. De quoi semer la confusion chez l’internaute, qui croira avoir cliqué sur le mauvais onglet. L’information est pourtant exacte. Voilà pourquoi le PER est souvent étiqueté « PER assurance » ou « PER assurantiel ». Le PER assurance et l’assurance-vie seraient-ils donc deux placements jumeaux ? En partie.Outre cet aspect juridique, les similitudes sont, sans conteste, fortes sur l’offre financière (unités de compte et fonds en euros) et sur la grille des frais appliqués (même si le PER est globalement un peu plus chargé).La construction technique des produits est aussi identique, avec des versements libres et/ou programmés par exemple, le tout étant exposé dans un jargon interchangeable d’une enveloppe à l’autre. « Le PER assurantiel est un copié-collé des contrats d’assurance-vie préexistants, avec pour différences principales, les adaptations réglementaires et fiscales exigées par le législateur en 2019 lors du lancement du PER », reconnaît un bancassureur de poids. Exact. Au jeu des différences, la gestion financière pilotée par horizon, incluse par défaut dans tout PER, loi oblige, est un premier point notable. Celle-ci évolue par des arbitrages programmés de l’allocation, décidés selon l’horizon retraite de l’assuré. Pour Gilles Belloir, directeur général de Placement-direct.fr, « ce procédé répond très bien à un temps de gestion long, s’adaptant à l’âge de l’épargnant et évitant les arbitrages inopportuns ».Rien de neuf sous le soleil, toutefois. Au début des années 2000, on trouvait des solutions analogues dans certaines assurances-vie, vite mises de côté faute de succès commercial.Autre altérité : le fonds en euros. Cantonné dans le PER, il va reposer sur une gestion plus longue et probablement plus rentable, ce support profitant du contexte obligataire actuel sans avoir emmagasiné trop d’obligations à rendement quasi-nul ces dernières années.Ce n’est pas tout : « concernant les prélèvements sociaux sur le fond en euros, ces derniers sont précomptés chaque année sur le contrat d’assurance-vie, ce qui vient éroder davantage la performance sur le long-terme, souligne Caroline Mounier, ingénieur patrimonial chez Eres. Ce n’est pas le cas pour le fonds en euros du PER, non soumis aux prélèvements sociaux tant que les sommes ne sont pas retirées du plan. La capitalisation de l’épargne placée sur le fonds en euros sera donc supérieure sur le PER, d’autant plus sur un horizon long. » Dont acte.
Liquidité et fiscalité : le fosséReste que l’antinomie-clé entre une assurance-vie et un PER est ailleurs. Au niveau du fonctionnement des produits d’abord, de leur traitement fiscal ensuite. Alors que l’assurance-vie permet de disposer de son épargne librement, à tout moment, le PER s’apparente à une souricière, blocage de l’épargne oblige jusqu’à la retraite. Mais alors que l’assurance-vie est dénuée de tout avantage fiscal au démarrage, le PER permet, lui, de réduire son impôt sur le revenu. Conclusion : « le PER est un bon placement retraite, avec des solutions financières adaptées et un cap clair, analyse Delphine Pasquier, directrice du développement de Prepar Assurance. Le blocage de l’épargne protège le cotisant contre la tentation d’utiliser les économies réalisées. Mais il convient d’y associer une assurance-vie pour deux raisons majeures. Un, l’épargne accumulée reste disponible à tout moment, contrairement au capital du PER. Deux, le régime fiscal à la sortie du produit est plus attractif, tant pour les retraits réalisés grâce aux abattements fiscaux, que sur la transmission du capital en cas de décès post soixante-dix ans. » L’essentiel est dit. D’autres professionnels ont un avis plus tranché, donnant la priorité à l’assurance-vie. « Le PER est un placement tunnel, avec un horizon fixe, la retraite, résume Olivier Sentis, directeur général de la MIF. Il faut faire le deuil de son épargne pendant longtemps, ce qui est assez contraignant. L’assurance-vie est un produit universel, utilisable à tout âge, quand le PER vise clairement les actifs imposables. » Une assertion qui va, en outre, se traduire dans la loi, les PER étant prochainement interdits aux mineurs (cf.encadré ci-dessous). Quant à l’âge limite de souscription, il est aussi plus encadré dans le PER. Les assureurs fixent souvent une limite contractuelle, autour de soixante-dix ou soixante-quinze ans. L’assurance-vie reste, en revanche, accessible plus tardivement, ce n’est que quatre-vingt-cinq ans passés que les compagnies sont plus réticentes aux ouvertures de contrats. Nul ne le conteste, sur le plan fonctionnel, le match tourne vite à l’avantage de l’assurance-vie. L’épargne n’y est donc pas bloquée, et les modalités de sortie y sont aussi très souples, avec les retraits partiels à la carte, tout en conservant la possibilité de reverser sur son contrat. On en est loin sur la majorité des PER, plus rigides sur ce point.Inversement, le PER est transférable d’un établissement à un autre, pas l’assurance-vie (cf. Investissement Conseils n° 865, octobre 2023, pages 14 à 20).Des différences à relativiser ? Pour Benoît Berchebru, directeur de l’ingénierie patrimoniale et fiscale chez Nortia (groupe DLPK), « il faut cumuler ces deux enveloppes. L’assurance-vie n’apporte pas de déductibilité fiscale à l’entrée, mais le capital est disponible à tout instant. C’est l’inverse avec le PER. Le blocage de l’épargne est à relativiser, puisqu’il existe cinq cas de déblocage anticipés pour accident de la vie et un autre pour l’achat de la résidence principale ». Précisément, ces situations de déblocage sont le décès du conjoint ou du partenaire de Pacs, l’invalidité du titulaire du plan ou de son conjoint (ou partenaire de Pacs) ou des enfants à charge, le surendettement du titulaire, l’expiration des droits au chômage, ou encore la cessation d’activité non salariée à la suite d’une liquidation judiciaire, et l’achat de sa résidence principale (contribution au plan de financement).A l’arrivée, le match entre les deux enveloppes se joue davantage entre quarante et soixante-cinq ans. Avant comme après, l’assurance-vie fait le plein. « Il en faut forcément pour construire et gérer son patrimoine, alors qu’il faut éventuellement un PER individuel selon sa situation fiscale aujourd’hui et celle prévue à la retraite, résume Gilles Belloir. Mais inutile de tourner autour du pot, le PER sera financièrement gagnant dès lors qu’on est imposé à 30 % au moins et qu’on verse l’économie d’impôt réalisée dans un produit d’épargne. Il sera même incontournable pour les foyers imposés à 41 ou 45 %. Si on est sous les 30 %, donc à 11 % ou non-imposable, le PER n’est pas attractif. Bref, sur le papier, l’objectif du PER est de se constituer un capital pour sa retraite, mais dans les faits, c’est l’avantage fiscal à l’entrée qui en constitue l’attrait principal. » Venons-en donc au nerf du match, la fiscalité.
De l’attrait fiscal du PERSur ce terrain, la partie se joue en deux temps. Il faut d’abord explorer la règle du jeu. Puis pour l’épargnant, mettre celle-ci en regard de sa situation fiscale et, plus compliqué, de ce qu’elle sera dans le futur. « Les versements sur le PER sont déductibles du revenu imposable, sous la limite de 10 % des revenus de l’année N-1 (eux-mêmes plafonnés), alors qu’il n’en est rien pour l’assurance-vie, précise Caroline Mounier. Mais à la sortie, les capitaux du PER seront imposables, ceux de l’assurance-vie peu, voire pas du tout, grâce aux abattements fiscaux annuels sur les retraits applicables si l’assurance-vie a une antériorité de plus de huit ans. Qu’en déduire ? En phase d’épargne, à condition d’être dans une tranche marginale d’imposition (TMI) à 30 % minimum, il est intéressant d’utiliser le PER plutôt que l’assurance-vie, puisqu’il permettra de générer une forme de prêt à taux zéro pour réaliser davantage de plus-values grâce à l’avantage fiscal procuré à l’entrée. Du reste, même si à la sortie, la TMI de l’assuré est identique, il aura été gagnant grâce à cet effet de levier. Pour autant, il faut aussi se constituer une épargne avec l’assurance-vie en parallèle, car à la retraite, on pourra piocher dans son contrat avec une fiscalité douce. » Bilan : le PER est un produit de défiscalisation efficace, l’assurance-vie non. Pour qui est dans une tranche à 41 ou 45 %, chercher à baisser sa facture fiscale est évident. C’est dans la tranche à 30 % que l’interrogation est davantage posée. Cette fois, la fiscalité n’est pas le seul élément décisif. Il faut en effet bien prendre en compte les contraintes du PER par rapport à l’assurance-vie, mais aussi les choix de gestion à réaliser. « Le PER sera gagnant uniquement si on investit sur la durée avec des fonds actions, notamment des fonds indiciels moins chargés en frais, analyse Sébastien d’Ornano, président de Yomoni. Si la stratégie est de faire du fonds en euros, on ne gagnera pas plus avec son PER qu’avec l’assurance-vie. En somme, sans intérêt fiscal à l’entrée, il faut clairement réorienter le prospect vers l’assurance-vie. La perte de liquidité sur le PER est à prendre en compte, ce que nous avons intégré dans nos interfaces digitales. Cette approche fait bien sûr partie du devoir de conseil des professionnels. » Et une fois en retraite ? Le PER va passer par la case « impôts ». Pour une sortie en capital (possiblement fractionné en plusieurs morceaux, ce qui est fortement conseillé pour éviter une fiscalité trop lourde et un changement de tranche marginale), ce dernier sera soumis à l’impôt sur le revenu et les plus-values au PFU (prélèvement forfaitaire unique). La rente viagère sera, elle, imposable comme une pension de retraite. Résultat, le gain fiscal à l’entrée, réalisé des années plus tôt, sera pour tout ou partie repris à la sortie. A TMI égal, l’opération serait donc neutre ? Fiscalement, oui. Au niveau financier, non.Entre-temps, la stratégie consistera à placer son économie d’impôt. « Il faut profiter de ce prêt gratuit par l’Etat pour générer plus de capitalisation, c’est un effet de levier important, conseille Gilles Belloir. A la retraite, en général la tranche d’imposition sera moins élevée, rendant l’opération probablement gagnante. » Quid de l’assurance-vie, en regard ? A la sortie, si le contrat a plus de huit ans, l’assuré profitera d’un cadre attrayant avec un taux de taxation sur les retraits à 7,50 % (12,80 % quand on détient 150 000 euros ou plus sur ses différents contrats, y compris les contrats de capitalisation). Pas de méprise, ce sont les intérêts compris dans le retrait qui sont ainsi taxés, pas la totalité du capital. Surtout, l’abattement annuel sur les intérêts de 4 600 euros pour une personne seule, de 9 200 euros pour un couple, change tout, permettant d’effectuer chaque année des retraits partiels significatifs à l’abri du fisc, hors prélèvements sociaux. Pour être complet, la fiscalité en cours de route doit aussi être rappelée. Dans le PER comme l’assurance-vie, récupérer son capital pour un gros coup dur rend l’imposition nulle (hors taxes sociales). Mais attention, la sortie du PER pour achat de sa résidence principale se traduira par l’imposition du capital (et les plus-values seront soumises au PFU). L’économie d’impôt réalisée à l’entrée sera donc rendue, voire plus si la TMI du titulaire est montée d’un ou deux crans dans l’intervalle.
Transmission : faire les bons choixEpargner, c’est aussi prévoir. Le PER étant un contrat d’assurance, il s’invite sans surprise sur un autre terrain, celui de la prévoyance.Et, paradoxalement, il fait ici beaucoup d’ombre à l’assurance-vie. « Les deux produits sont d’excellents outils de transmission, sous condition que le PER soit de nature assurantielle, avance Caroline Mounier. Tous deux reposent sur le principe de la désignation d’un (ou plusieurs bénéficiaires) qui recevra les capitaux en compte si l’assuré du PER décède avant d’en avoir perçu l’intégralité. La fiscalité est toutefois différente puisque l’application des articles 990 I et 757 B du CGI dépend de l’âge de versements sur l’assurance-vie, alors qu’on prendra en compte l’âge au moment du décès sur le PER, avant ou après soixante-dix ans. Quelles conclusions en tirer ? Que la transmission pourra s’avérer plus avantageuse si le bénéficiaire est le conjoint puisque d’une part, il sera exonéré totalement au titre de la fiscalité (loi Tepa), au même titre que l’assurance-vie du reste, mais il ne subira en plus aucune pression sociale. Les prélèvements sociaux ne sont en effet pas dus dans le cadre d’une transmission via un PER, contrairement à l’assurance-vie. Si le montant de la plus-value est important sur les supports unités de compte, l’économie peut être significative, le taux des prélèvements sociaux étant actuellement de 17,2 %. Si les bénéficiaires sont des enfants, l’assurance-vie sera, en revanche, plus intéressante, en prenant l’hypothèse la plus probable que l’assuré décède après soixante-dix ans et que les versements ont été réalisés avant ses soixante-dix ans. Avec l’assurance-vie, chacun des enfants profitera d’un abattement de 152 500 euros sur les capitaux transmis. Ce n’est pas le cas du PER, où sera fait application de l’article 757 B du CGI, les enfants devront alors se partager un abattement de 30 500 euros. »Rappelons maintenant deux détails importants. Un, les abattements précités s’entendent pour l’ensemble des contrats détenus, assurances-vie et PER assurantiels compris. Deux, les conjoints et partenaires pacsés sont exonérés de droits de succession en toutes circonstances. Partant de là, à chacun de prendre les bonnes décisions selon sa situation familiale. Prenons le cas fréquent du couple marié. « Le PER est un outil de protection remarquable du conjoint, pointe Benoît Berchebru. Dans un couple, la bonne stratégie miroir à mettre en place est la souscription d’un PER par chacun des époux et de l’alimenter de manière égale. Si l’un d’eux décède avant que les PER aient été utilisés, le survivant reçoit le capital du PER du défunt hors succession et sans fiscalité, le conjoint étant exonéré de droits, et même des prélèvements sociaux, contrairement à ce qu’il en est avec l’assurance-vie. Il peut récupérer les fonds de son propre PER sans aucune fiscalité, hormis les prélèvements sociaux sur les intérêts/plus-values, puisque le décès du conjoint fait partie des cas de déblocage anticipé sans imposition du capital. C’est ici plus efficace que l’assurance-vie pour protéger le conjoint, puisque le bénéfice fiscal obtenu par les versements dans le PER n’est pas repris à la sortie. Il faut toutefois noter que les montants transmissibles ainsi sont limités, puisque les versements déductibles du revenu imposable sont plafonnés, sauf à transférer d’ex-produits retraite, notamment des contrats Madelin, sur lesquels les sommes en compte peuvent être plus importantes.»En tout état de cause, la gestion de la clause bénéficiaire ne doit pas être négligée, dans un PER comme avec l’assurance-vie. Même une fois à la retraite, elle peut être modifiée en fonction de sa situation, donc de son âge (plus ou moins de soixante-dix ans).
A chacun selon sa situationQuel bilan tirer de ce face-à-face ? Pour Delphine Pasquier, « en matière d’épargne-retraite, la bonne stratégie est de raisonner par âge. Pour les jeunes ménages, la priorité est de se constituer un capital financier disponible à tout moment. L’achat de la résidence principale constitue un autre temps fort autour de la trentaine. L’assurance-vie accompagne pleinement ces objectifs. Une fois ce socle bâti, le PER va prendre toute sa place, la défiscalisation des versements allant de pair avec une carrière professionnelle ascendante. Il est donc utile d’équilibrer les deux produits selon les phases de sa vie, et ne surtout pas confondre les deux enveloppes sur la disponibilité des capitaux. » Un équilibre d’autant plus atteignable que sa capacité d’épargne est importante, bien sûr.Outre la situation fiscale, l’âge est donc une variable d’ajustement importante. « Pour les salariés, l’âge optimal pour alimenter un PER est autour de quarante/quarante-cinq ans, souligne Gilles Belloir. Si on veut avoir un capital significatif à la sortie, il ne faut pas commencer trop tard. Pour les travailleurs non-salariés, on démarre plus tôt à mettre de côté. Mais il faut faire attention à conserver de l’épargne liquide en parallèle. » Ce n’est pas tout. Les objectifs poursuivis doivent également être pris en compte, pour éviter des désillusions. Par exemple, les couples ayant un projet de résidence secondaire doivent privilégier l’assurance-vie, le PER ne permettant pas de débloquer les capitaux dans ce cas-là.Sans conteste, l’assurance-vie est un placement plus adaptatif que le PER. Reste à tout mettre en musique. L’apport d’un CGP sera ici décisif pour avoir une approche globale du patrimoine, de la situation familiale et de l’optimisation fiscale. L’occasion de s’interroger sur d’autres pistes. Comme celle du PER bancaire, trop vite écartée des analyses (cf.encadré ci-dessous). Comme celle de dupliquer les enveloppes. Pertinent ? « Souscrire plusieurs PER ne présente pas de réel intérêt, sauf à avoir des gestions financières très spécifiques selon les produits, répond Delphine Pasquier. En revanche, détenir plusieurs assurances-vie présente des avantages. On pourra, par exemple, dédier un contrat à la construction d’un complément de revenu retraite, et un autre à la transmission d’un capital. On pourra également désigner des bénéficiaires spécifiques, sans avoir à les regrouper au sein d’un seul contrat, ce qui facilitera le versement des capitaux des décès. Les gestions financières pourront, quant à elle, être adaptées selon les contrats:une approche sécuritaire composée principalement de fonds en euros sur l’un, une approche plus dynamique avec des fonds actions sur l’autre, etc.»Le match « assurance-vie/PER » est donc sur la table. Complémentaires, les deux produits vont in fine s’emboîter au fil du temps. « Dans la pyramide du patrimoine, l’assurance-vie est prioritaire, conclut Benoît Berchebru. Avant trentecinq ans, la tranche marginale d’imposition n’est, en général, pas très élevée, il vaut mieux privilégier une enveloppe liquide et souple comme l’assurance-vie sans impact sur la défiscalisation des primes. L’aspect défiscalisation sera davantage pris en compte par la suite, quand la TMI sera au moins à 30 %, et surtout à 41 et 45 %. Ces conseils sont évidemment modulables selon les situations. Pour optimiser l’usage de l’assurance-vie et du PER, leur bonne combinaison, l’épargnant doit s’appuyer sur un conseil patrimonial qualifié. »
Mineurs : le PER bientôt interditSauf rebondissement de dernière minute, le PER ne sera plus accessible aux mineurs (souscriptions et versements dans les PER déjà ouverts) l’an prochain. Bercy l’a récemment confirmé et la disposition figure dans la loi de finances pour 2024. Jusqu’ici, les assureurs-vie étaient partagés sur l’ouverture de ce produit aux mineurs. Certains, comme BPCE Vie (assureur des Banques populaires et de la Caisse d’épargne principalement), ont toujours refusé sa mise en place. Mais bien d’autres n’y mettaient pas d’objection. Pour Benoît Berchebru, « la souscription des mineurs au PER était jusqu’ici autorisée, sinon pourquoi changer la loi ? De nombreux arguments autres que le gain fiscal pour les parents militaient pour l’ouverture d’un PER à un enfant mineur, notamment le blocage de l’épargne qui allait financer des buts précis que sont l’acquisition de la résidence principale et la constitution d’un capital retraite. Il est choquant de changer la règle en cours de jeu, ce qui va pénaliser tous les PER ouverts à des mineurs jusqu’ici, la souscription d’un PER mineur s’inscrivant dans une stratégie patrimoniale globale à long terme, et non pas dans une stratégie purement ou principalement fiscale. » Les PER déjà ouverts seraient possiblement réorientés vers le nouveau plan d’épargne avenir climat (PEAC), dont l’univers d’investissement sera pourtant tout autre. Par comparaison, l’assurance-vie est ouverte aux mineurs. Il est en outre possible d’y inclure des clauses d’inaliénabilité pour bloquer l’usage de l’épargne jusqu’à un certain âge.
Assurance-vie et PER à la retraiteEcartons la sortie en rente, très peu prisée des Français. De l’avis des professionnels, la sortie en capital du PER (possible partiellement dans les ex-produits retraite) est l’un des éléments qui contribue à son succès. Du reste, il est possible de récupérer ses avoirs de manière étalée, sous forme de « capital fractionné » dans le jargon du PER. Attention toutefois aux dispositions contractuelles, très variables selon les produits. Certains prévoient, par exemple, un étalement maximal sur cinq ou dix ans, avec des versements trimestriels ou semestriels, quand d’autres sont beaucoup plus souples, autorisant à moduler l’ensemble, à choisir les supports sur lesquels le capital est prélevé, etc. Au niveau fiscal, le capital sera soumis à l’impôt sur le revenu et ses intérêts au PFU de 30 %. L’assurance-vie est sur ce point gagnante. Fiscalement, si le contrat a plus de huit ans, les abattements de 4 600 euros (célibataire) ou 9 200 euros (couple) permettent d’effectuer des retraits élevés sans payer d’impôt. Les retraits à la carte ou programmés sont aussi plus malléables que dans le PER.Conclusion : si une épargne a été constituée dans les deux enveloppes, il sera sans doute plus intéressant de venir piocher dans l’assurance-vie. Et ce d’autant plus que le conjoint est désigné bénéficiaire des capitaux sur le PER en cas de décès, ce qui éviterait toute imposition du capital reçu, y compris en cas de décès post-soixante-dix ans. Reste un dernier point d’analyse : épargner une fois à la retraite. L’assurance-vie est une enveloppe très utilisée par les retraités ayant une capacité d’épargne suffisante, notamment avant soixante-dix ans (mais aussi après).Qu’en est-il du PER ? Contre toute attente, cette solution n’est pas à écarter. « Ouvrir un PER à la retraite, puis l’alimenter mérite d’être exploré, explique Caroline Mounier. Les versements déductibles vont en effet permettre de réduire l’imposition du bénéficiaire. Dans un objectif de transmission, cet avantage à l’entrée ne sera pas “repris” à la sortie. Attention, les versements déductibles peuvent être réalisés jusqu’à un âge limite, qui sera indiqué dans la notice contractuelle du PER. A défaut d’information sur ce point, le maximum légal va s’appliquer, à savoir l’espérance de vie à laquelle on soustrait quinze années. Au-delà, il n’y aura plus de déduction du revenu imposable. » Cette piste prend d’autant plus de sens que le cumul emploi-retraite est poussé par les pouvoirs publics. La réforme votée au printemps change en effet la donne sur ce point, puisque poursuivre une activité professionnelle, tout en percevant sa pension, permettra désormais d’acquérir de nouveaux droits à retraite (plafonnés toutefois, notamment dans les régimes complémentaires). Les revenus professionnels perçus permettront de maximiser l’avantage fiscal à l’entrée, tout en utilisant le PER, in fine, dans une optique transmission.
Le PER bancaire, un produit dans l’ombreLa quasi-totalité des PER commercialisés sont aujourd’hui dits assurantiels, reposant donc sur un contrat d’assurance-vie. La loi Pacte de 2019 ouvrait pourtant une autre porte, celle du PER adossé à un compte-titres, dit PER bancaire. Seuls le groupe Crédit agricole (pour l’un de ses deux PER, l’autre étant assurantiel), le groupe Inter Invest et Yomoni ont lancé ce type d’offre.Moins chargé en frais, plus flexible, donnant accès à un univers d’investissement en actions plus large, le PER compte-titres avait de quoi séduire. Mais il souffre de l’absence d’un fonds en euros pour sécuriser le capital. Pour y pallier, Inter Invest vient de proposer un certificat de BNP Paribas, qui vient garantir le capital à la retraite (pas avant). Autre point négatif : en cas de décès, le PER bancaire intègre la succession, sans relever du régime fiscal de l’assurance-vie. Pourquoi une offre si minimaliste à l’arrivée ? « Le PER bancaire ne rend pas assez de marge aux distributeurs, confie un gestionnaire de PER. C’est là son principal point d’achoppement expliquant sa non-commercialisation. Le PER assurance est, lui, fondamentalement plus chargé en frais, justifiant sa diffusion en masse sur le marché. »