Spirica a jeté un pavé dans la brèche de la garantie en capital des fonds euros en lançant des contrats innovants pour dynamiser les rendements. Entretien avec Daniel Collignon, son directeur général, qui dévoile ses ambitions pour 2021 et sa stratégie dans le Private Equity grand public.
Investissement Conseils:Comment Spirica a-t-elle vécu l’année 2020 ? Et comment démarre-t-elle 2021 ?
Daniel Collignon: Le bilan de l’année est positif et nous avons bien traversé 2020 malgré le contexte difficile. La collecte en légère baisse de 2 % à périmètre constant, s’élève à 1,235 milliard à fin 2020 avec une part d’UC dans la collecte brute proche de 60 %. Une fois considéré l’ensemble des mouvements d’entrées-sorties-arbitrages, le taux d’unités de compte dans la collecte nette s’élève à 95 %. Ce taux élevé est similaire à celui que nous avions connu en 2018, mais bien plus élevé que celui de 2019. Ces chiffres sont encourageants car ils montrent que nos clients et surtout leurs conseillers ont compris les enjeux du marché et l’évolution des fonds en euros.
Quelle est la physionomie de la compagnie aujourd’hui ?
D. C. Spirica est un assureur spécialisé dans la conception et la gestion de solutions d’assurance vie et de retraite, distribuées par l’intermédiaire de ses partenaires: platesformes de conseillers en gestion de patrimoine, courtiers Internet et banques privées. Les CGP représentent un peu plus de 50 % de notre activité, et notre plate-forme UAF Life Patrimoine, filiale à 100 %, réalise à elle seule 80 % de la collecte auprès des CGP. Nous travaillons aussi avec la plate-forme Nortia ou auprès de cabinets, comme Cyrus ou Herez. Internet représente environ 20 % de notre activité. En parallèle, nous disposons de partenariats de nature différente, par exemple la distribution d’un contrat gestion de fortune via Indosuez ou encore la distribution de produits d’assurances-vie et retraite via le réseau d’agents généraux de La Médicale. Avec un peu plus de 1,2 milliard d’euros de collecte et 9,5 milliards d’euros d’encours à fin 2020, nous pesons 1 % du marché de l’assurance-vie.
Comment se démarque Spirica sur le marché des CGP ? Des évolutions en vue cette année ?
D. C. Notre plate-forme UAF Life Patrimoine propose des offres adaptées et performantes, notamment la meilleure gamme d’unités de compte immobilières du marché. Nous ambitionnons de nous positionner de manière aussi forte sur le Private Equity dans les mois à venir pour mettre à disposition des clients des fonds jusqu’ici réservés aux institutionnels, à l’instar du fonds Ardian déjà positionné dans notre portefeuille. Nous comptons aujourd’hui huit fonds de Private Equity, ce sera une douzaine d’ici l’été. Nous avons aussi intégré à l’automne dernier le fonds croissance ALT, qui reçoit un bon écho. L’offre est aussi riche en ETF, en fonds ISR, en fonds structurés, en titres vifs, l’objectif étant d’être capable de répondre à la demande de chaque CGP. Nos contrats sont, par ailleurs, très souples, avec la possibilité d’y combiner plusieurs modes de gestion sous mandat, y compris de sociétés de gestion différentes.
Second point de différenciation, les services. Nous avons beaucoup travaillé sur la numérisation et l’automatisation ces dernières années, ce qui nous a beaucoup aidés en 2020. En 2019, nous mettions en place la souscription en ligne et la signature électronique. L’année 2020 a donné un coup d’accélérateur à ces outils et nos partenaires les ont utilisés de manière adaptée. Notre offre permet aujourd’hui de réaliser la quasi-totalité des opérations en dématérialisé, souscription, versements, arbitrages, retraits, avec des délais très rapides. Nous comptons aller encore plus loin cette année avec la digitalisation de l’ensemble des actes de gestion autorisés. Par exemple, il sera bientôt possible de modifier une clause bénéficiaire de manière électronique. Enfin, la troisième force très spécifique d’UAF Life Patrimoine, ce sont les femmes et les hommes qui animent cette entreprise. La relation humaine de nos équipes commerciales avec les CGP est un point clé pour nous développer sur ce marché.
Vous avez lancé un nouveau type de fonds en euros l’an dernier. Pourquoi ?
D. C. Nous avons créé notre nouveau fonds euros pour une raison assez simple, la baisse durable des taux d’intérêt depuis plusieurs années. Dans le cadre Solvabilité 2, la valeur future des contrats est intégrée dans les fonds propres de l’assureur. En combinant cette règle et les taux actuels, la valeur des fonds euros est négative. Chaque fois que nous vendions des fonds en euros, cela détruisait une partie de nos fonds propres, ce qui a conduit des assureurs à imposer une part d’unités de compte pour compenser partiellement cette part négative. Nous avons pris le problème différemment en créant un fonds euros dont la valeur est positive, ce qui se traduit par une garantie plus faible. Nous en tirons plusieurs avantages gagnant/gagnant avec nos clients. Les épargnants peuvent investir sur le fonds en euros, cela génère des fonds propres, et permet une gestion plus diversifiée de l’actif et plus de performance à l’arrivée. La souplesse de notre fonctionnement permet aux épargnants qui voudraient investir sur des unités de compte, mais jugent le timing inadéquat, de verser à 100 % sur ce nouveau fonds en euros, d’y rester six à douze mois et d’arbitrer ultérieurement. La contrepartie est simple. S’il y avait une année très mauvaise, ce qui ne s’est jamais produit, l’assuré pourrait perdre 2 à 2,30 % selon les contrats, contre 0,7 % à 1 % avec notre ancien fonds euros. C’est un risque très limité, d’autant que la liquidité de ce type de produit permet aux assurés de sortir lorsqu’ils le souhaitent. De manière plus large, je crois encore dans le fonds euros, qui correspond à une attente réelle de nos clients, notamment sur la sécurité. Cela reste un outil important en assurance-vie, mais il fallait trouver un intérêt commun entre les épargnants, les intermédiaires et l’assureur. Nous avons mis en place un nouveau standard, qui sera sans doute repris sur le marché.
Comment les CGP ont-ils, eux, appréhendé ce nouveau fonds en euros ? Que faut-il en attendre ?
D. C. Les CGP ont bien intégré cette évolution, que nous avions pris le temps d’expliquer. Si c’est opportun, nous intégrerons à l’avenir ce nouveau fonds euros dans nos anciens contrats. Côté rendement, le calcul est très simple. Nous allons accroître la diversification de l’actif de 10 à 15 %. Si cette part rapporte 3 % de plus que les placements obligataires, nous obtiendrons 30 à 45 centimes de rentabilité supplémentaire chaque année. Il s’agit bien d’un fonds euros classique, qui recherche la régularité du rendement, avec un peu plus de fluctuation que d’ordinaire. Des provisions de rendement pourront être réalisées, puis reversées pour lisser l’ensemble. Mais ce n’est pas un fonds en euros dynamique aux rendements très volatils. Nous avons lancé en parallèle le fonds croissance Allocation Long Terme dans nos contrats, qui prévoit une garantie du capital à 80 % au bout de huit ans. Il se positionne entre le fonds euros et les unités de compte avec une lecture assez simple, puisqu’il est composé en quatre parts égales d’immobilier, de Private Equity, d’obligations et d’actions. Nous visons une performance de 4 % en moyenne par an sur ce fonds.
Un mot sur l’épargne-retraite:quel premier bilan pour Spirica ?
D. C. Il est très positif. Nous n’avions pas de Perp et proposions seulement du Madelin via le réseau d’agents de La Médicale; nous sommes donc partis d’une feuille blanche pour lancer notre PER en septembre dernier avec un principe, qu’il soit au moins aussi riche qu’un contrat d’assurance-vie. Nous y avons apporté des plus par rapport aux offres standards, comme la possibilité de gérer activement son capital une fois en retraite. En 2020, nous avons enregistré quatre mille souscriptions. Ce produit fonctionne très bien, avec un bon relais des conseillers en gestion de patrimoine.
Quel message pour les CGP en 2021 ?
D. C. L’année 2020 a été une année exceptionnelle pour les CGP. C’est le modèle de distribution le plus résilient du marché, avec un contact humain très fort et l’adoption d’outils numériques de qualité. Ils ont une carte à jouer pour dépasser leurs 7 % de parts de marché. La clientèle en assurance-vie est vieillissante et il faut la renouveler. Pour parler à la jeune clientèle, celle qui construit son patrimoine, nous envisageons de lancer une offre accessible par smartphone cette année avec certains partenaires. Les CGPI ont là un enjeu majeur à saisir pour s’inscrire dans le moyen terme.
“ Nous ambitionnons de nous positionner sur le Private Equity dans les mois à venir pour mettre à disposition des clients des fonds jusqu’ici réservés aux institutionnels, à l’instar du fonds Ardian déjà positionné dans notre portefeuille.
” “ Pour parler à la jeune clientèle, celle qui construit son patrimoine, nous envisageons de lancer une offre accessible par smartphone cette année avec certains partenaires.